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Cie Philippe Saire
Av. de Sévelin 36
1004 Lausanne
Suisse

en résidence permanente au Théâtre Sévelin 36

+41 21 620 00 12 info@philippesaire.ch

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Jour de fuite spectacle ×

Première au Théâtre Sévelin 36, le 5 mars 2003. Solo créé et interprété par Philippe Saire.

Dans cette pièce, le chorégraphe interroge la mise en représentation et l’illusion des certitudes. Un solo en éloge au flou, au trouble et à l’ombre. Créateur et interprète de Jour de fuite, il se confronte pour la troisième fois à cet acte intime qu’est le solo.

En 1987, il créait Paresseux Vertiges, production où la danse dialoguait avec des textes de Beckett. En 1993, c’était L’Alibi et le Topographe, solo qui sera retravaillé en 1996, en intégrant des textes de Georges Perec. Dix années plus tard, après nombre de créations et de tournées avec sa Compagnie, il éprouve le besoin de se confronter à la scène, de recentrer son travail de chorégraphe, de goûter à nouveau au rapport avec le public.

C’est un objet très particulier, le solo d’un chorégraphe qui travaille en général avec un groupe de 8 à 10 danseurs. Il relève presque nécessairement d’une interrogation sur son métier, sur ce code spécifique de la dane et du mouvement, et un besoin de revivre des sensations de l’intérieur, de replonger dans la matière vivante du spectacle. Un solo de chorégraphe, cela tient du rituel de passage, où l’on essaye de tuer son savoir pour renaître différent. Pour Jour de fuite, Philippe Saire s’est entouré d’une équipe artistique qui fut impliquée, dès le début, dans le processus de création.


Quel qu’en soit le thème, un solo parle de toute façon d’un recentrage sur sa personne. D’une attention à soi quasiment anormale, voire d’égocentrisme. C’est peut-être en cela qu’un solo fait le plus sens dans la situation actuelle. Dans un monde caractérisé par le souci très présent de soi-même, de sa propre construction, de son propre épanouissement. Avec à la clé cette idée que nous avons une maîtrise sur notre destin, sur nos ravissements. Sur le plan artistique, cela se traduit par une valorisation particulière du quotidien, du banal, de son propre corps.
A un ma vie est une œuvre d’art et à une sorte de mise en scène du quotidien. Médiatiquement, le quotidien du Loft fascine. Paradoxalement, le doute sur la fabrication de ce quotidien fascine tout autant. Nous avons besoin de témoins. Nous avons besoin de reconnaissance, de confirmation. Nous avons besoin de l’authentification de l’image.
Au travers de toute cette situation me viennent des termes comme celui de déplacement, de glissement, de dérive. Sismiques, profonds. Comme si nous étions à côté, de nous-mêmes, de ce que nous voudrions être. Comme si un décalage existait entre nos actes et nos aspirations. Me vient aussi une sensation d’insécurité. Nous jouons à une sorte de jeu de construction absurde : nous devons sans cesse nous positionner sur un terrain instable et glissant. L’adaptabilité, valeur portée aux nues et preuve de base d’une ouverture d’esprit, ne serait-elle finalement qu’un pansement ? Me vient l’impression d’une peur générale, peur d’être juste, à sa place, et d’arriver à s’inscrire dans quelque chose de plus large. Alors que ce quelque chose est moins défini que jamais. >Me vient enfin le sentiment vague d’être pris au piège, et de devoir accomplir une tâche impossible et quasiment schizophrène : D’être chacun acculé à gérer son destin, à être responsable de son bonheur, à se faire reconnaître.
De devoir en même temps ignorer et lutter contre une peur viscérale et latente.
(Celle d’un cauchemar d’enfant qui rêve qu’une bête a dévoré dans la nuit toute sa famille, et que cette bête attend, tapie dans le noir, qu’il laisse sortir ne serait-ce qu’un orteil du drap, pour sauter sur lui). Peut-être que ce solo c’est juste ça : Un solo pour conjurer la peur.
Philippe Saire

On ne sait pas de quelle nuit nous venons, ni vers laquelle nous allons. On ne sait pas si nous sommes nés à telle date ou dans le fond des âges. On ne sait pas si nous sommes quelqu’un ou n’importe qui. On ne sait pas si nous portons un nom ou pas. On ne sait pas comment la forêt bruissante de notre enfance est devenue la forêt métallique des villes. On ne sait pas si la lumière braquée sur nous est celle d’un souvenir qui nous obsède ou de l’Etat qui nous arrête. On ne sait pas si le bruit de nos pieds qui marchent est celui de nos os dans notre chair. On ne sait pas si le son qui bat dans nos oreilles provient d’un bal ou de notre cœur. On ne sait pas si notre rire est un cri. On ne sait pas si l’air nous dilate ou nous consume. On ne sait pas si nous devons bouger ou rester immobiles. On ne sait pas si nous devons nous montrer ou nous cacher. On ne sait pas si nous devons chanter ou nous taire. On ne sait pas si nos gesticulations sont l’expression de la vaillance ou de la terreur. On ne sait pas si nos actes sont des convulsions.
On ne sait pas si les murs qui nous entourent sont ceux d’un refuge ou d’une prison. On ne sait pas si le sol est un pan du ciel. On ne sait pas si nos congénères nous veillent ou sont absents. On ne sait pas s’ils nous observent ou sont aveugles. On ne sait pas s’ils nous aiment ou s’ils nous trompent. On ne sait pas si nous avons besoin d’eux pour être seuls. On ne sait pas s’il faut conserver nos traces ou les effacer. On ne sait pas si nous sommes fatigués ou si nous allons mourir. On ne sait pas si nous sommes penchés vers le sol pour y percevoir nos origines ou pour nous y dissoudre. On ne sait pas comment muer le temps qui passe en sentiment d’éternité.On ne sait pas si le souffle qui nous emporte dans la mort est né du vide ou fomenté par les dieux. Ne pas le savoir est sans effet sur ceux qui nous suivent. Ils continuent.
Christophe Gallaz, écrivain


A n’avoir ainsi que soi pour partenaire, avec l’espace, le son et la lumière, le danseur, à fortiori le chorégraphe se dépouille de tous les faux-semblants. Il se dénude, corps et âme. (…) C’est moins de fuite qu’il s’agit que de retrouvailles avec soi-même. (…) L’ombre n’est pas que l’absence de lumière. C’est aussi l’image en négatif du danseur, tantôt portée sur le sol, tantôt sur les murs. Saire en joue. Et la lumière n’est pas que la clarté. C’est aussi des formes légères qui balaient l’espace de tout leur éclat, comme autant de lignes de fuite… Autre jeu fascinant.
Jean-Pierre Pastori, Tanz&Gymnastik, 2.2003

Lui aussi (Philippe Saire) fuit dans un monde où il risque peu d’être poursuivi. Il s’est d’ailleurs gardé d’en baliser le chemin. Ce qu’il voulait, c’était créer de fausses pistes et laisser de faux indices à ses éventuels poursuivants. Il lui fallait échapper, ne serait-ce qu’un jour, à la pesanteur de cet univers. Quarante-cinq minutes de solo, donc, où le fuyard narcissique danse son bonheur d’être en retrait de la vie. Ce bonheur-là, il ne le cèderait pas pour tout l’or du monde.
Le solo qu’il a conçu correspond à un besoin vital de sauver sa peau. Sa peau d’homme « harcelé, comme il dit, par les recettes de bonheur qu’on nous conseille d’appliquer à la lettre si l’on veut réussir. A cette nécessité de réussir, Philippe Saire dit halte. « L’envie de reconnaissance, que les émissions télévisées projettent et entretiennent, génère une tension insupportable », lâche-t-il.

Ghania Adamo, Swissinfo, 4.3.2003


Chorégraphie et interprète
Philippe Saire


Création musique
Matthieu Burner


Lumière
Laurent Junod


Scénographie
Anne Peverelli


Relance
Hélène Cattin


Costumes
Isa Boucharlat


↳ PHOTOS HD
↳ FICHE TECHNIQUE

Dates passées

Lausanne (CH)
05.03.2003
08.03.2003
Milan (IT)
22.05.2003
24.05.2003
Berne (CH)
30.11.2003
30.11.2003
Nyon (CH)
19.02.2004
21.02.2004
Lausanne (CH)
03.03.2004
07.03.2004
Zürich (CH)
29.10.2004
29.10.2004
Berne (CH)
11.12.2004
12.12.2004